Portrait - Un rêve californien

Vincent Deroussent

Imaginez la côte californienne au début des années 60. La jeunesse surf entre vagues, bikinis et les plages sur fond de Beach Boys. Cette carte postale de la "surfin music" émigre directement en France sur les plages de Biarritz et se diffuse dans les rangs de la jeune génération dont Bruno de Stabenrath fait partie. De là va naître son premier émoi musical, une passion pour les frères Wilson et compagnie.

Dans un salon transformé en vitrine muséale, les références sont alignées, orchestrées minutieusement. Entre action man et pin-up installés comme des groupies autour de Jimi Hendrix, l’arrière plan musical est planté. Bruno de Stabenrath me présente fièrement le dictionnaire officiel, ou plus exactement, « la bible de la surf musique ». Une période où le soleil, les filles et la musique agitaient ses journées. Dans l’esprit de l’écrivain, le « sea sex and sun » résonne bien plus que Satisfaction des Stones ou Yesterday des Beatles : « j’adore écouter les Beatles à la radio, c’est bien écrit […] Par contre j’ai un problème avec Mick jagger. Je le vois plus comme un homme d’affaire de talent ; il y a un truc qui m’a toujours dérangé chez lui. J’ai une vision de l’artiste qui se rapproche plus d’Eric Clapton ou de Brian Wilson, avec une certaine fragilité. Les Stones ont eu l’intelligence de fabriquer leur carrière. Enfin, ça ne les empêche pas d’avoir fait de supers titres. Tu vois j’ai même une photo de Keith Richard accrochée sur le mur.» Au jeu de l’interview, Bruno de Stabenrath, ne s’y prête pas. Nous sommes là pour échanger, partager, converser autour d’une vibration, la musique. Un véritable lexique musical s’ouvre à moi, il me faut choisir les bonnes pages à explorer.

« Les destins brisés du rock », un pléonasme

Sous forme d’hommage générationnel, Bruno de Stabenrath a écrit plusieurs livres sur la musique dont « les destins brisés du rock ». Dans cet ouvrage, titré sous forme de pléonasme, les plus grands noms s’accumulent, tels des faits divers exceptionnels. Le livre sent l’amour d’un art, la transpiration d’une passion, l’envie d’explorer des destins, des secrets. Parmi les artistes évoqués dans son livre, un bout d’homme a particulièrement touché l’écrivain. Il s’appelle Randy road, c’est un jeune guitariste prodigue, fils de professeur de musique et lui-même professeur de guitare à 14 ans, mort à l’âge de 24 ans. « Randy Road commence à jouer dans les clubs et se fait repérer par Ozzy Osbourne. Sa mort est assez triste et accidentelle à cause d’un gars drogué. Il m’a touché parce que j’ai vu les photos, je suis rentré dans sa vie pour écrire le livre. Je l’ai même écouté jouer de la guitare, il avait un très bon son. C’est comme Dire Straits, il avait un son à lui. » Parmi les âmes parties trop rapidement, l’auteur retient aussi Jeff Bucley « il avait encore beaucoup de chose à dire ». Après une énumération de noms qui n’en finit plus, nous concluons par une mystérieuse épitaphe : début des années 70 avec la disparition de grandes figures des années 60 notamment Janis Jopplin, Jimi Hendrix, Jim Morrison et Bryan Jones. « Tous mort à l’aube de leur apogée ».

Pas facile de retenir les références évoquées, mais pour chacune d’elle, l’auteur et musicien n’hésite pas à chantonner, mimer, retranscrire, les souvenirs imprimés dans sa mémoire. A l’issu de notre rencontre, j’envie le florilège musical qu’il possède. Réciproquement, Bruno de Stabenrath sourit à l’idée d’avoir « des tympans neufs » comme les miens qui permettraient de redécouvrir des artistes au son mythique. Tel un aventurier nostalgique, Bruno de Stabenrath aime se perdre dans ses souvenirs d’antan pour mieux comprendre et respirer la vie d’aujourd’hui.

 

 


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